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On vous promet que le covoiturage est LA solution idéale pour diminuer votre impact sur l’environnement. C’est même l’astuce de la décennie pour faire des économies dans votre budget voiture. Seulement voilà, comme pour tout ce qu’on vous propose pour vivre moins cher, vous devez d’abord être sûrs que c’est vraiment dans votre intérêt. Attention ! Vous risquez de tomber de haut après avoir lu cet article. Un nouveau bon plan pour les pigeons ?
Si l’on s’en tient à la tendance actuelle, c’est le bon plan pour apporter sa pierre à l’édifice de la vertu environnementale. Les voitures à moteur thermique étant le diable absolu dans ce domaine, moins on se sert de la sienne, meilleur sera l’air que vont respirer nos enfants. On est tous prêts à faire preuve d’altruisme mais paradoxe, pas à n’importe quel prix !
Quand on souhaite faire don de son temps, de son argent ou de quelque chose que l’on possède, il faut être prêt à ne rien attendre en retour. On est riche et on veut donner de sa richesse à quelques-uns qui en manquent. Le covoiturage, au sens littéral c’est une première étape vers cet altruisme dont vous ne retirerez que de la fierté après avoir donné de votre personne.
Depuis que les moyens de transport existent, il y a toujours eu quelqu’un pour vous proposer de profiter du voyage. Au temps des charrettes tirées par un animal, on allait travailler aux pâturages couché dans le foin ou la luzerne. Pour aller user nos fonds de culotte sur les bancs de l’école, on prenait le bus communal. Pour voir du pays à l’occasion de ses premiers congés payés, on tendait le pouce au bord de la route, un bout de carton ensoleillé à la main et le minimum vital sur le dos. C’était gratuit, enrichissant du point de vue social et on se fabriquait de beaux souvenirs.
Depuis que le modèle économique du service payant est en vigueur, l’altruisme a fait place à l’opportunisme. Dès l’instant où le servage ne profitait plus qu’aux seuls seigneurs, les gens se sont mis à vendre leur temps. Le service est devenu un « travail qui mérite salaire ». On ne va plus se le cacher, dans le covoiturage, il y a aussi de l’argent à se faire. En fait, il y a surtout de l’argent à se faire sinon, on n’en serait pas là.
Que l’air soit de nouveau débarrassé de toutes les émissions polluantes, comme au temps des anciens rois, ce n’est pas mesurable en temps réel. On ne ressent jamais à l’avance le bonheur de l’accouchement. Tout ce qu’on sent c’est le temps que ça dure au quotidien et la douleur dans les derniers instants qui le précèdent. Pour le covoiturage, on nous a vendu un avenir radieux en nous faisant payer notre présent. On nous fait croire que tout se passera au mieux plus tard, si nous payons maintenant. Et comme nous paierons tout le temps, le futur restera le futur. On commence à guetter l’envol des pigeons ?
Dans le covoiturage c’est même encore plus évident. La société pionnière dans ce domaine et dont je ne citerai pas le nom pour ne pas l’aider à être référencée, a rendu l’auto-stop payant. Un petit malin s’est dit un jour : « Comme les gens sont devenus accros à leur smartphone, je vais acheter un logiciel, un serveur et quelques influenceurs et je vais créer un site de rencontres pour les conducteurs de voitures particulières. Ensuite je n’aurai qu’à les laisser décider du prix du trajet et je prendrai un pourcentage ». Bienvenue dans le modèle start-up mes amis. Je me répète : dans le covoiturage, il y a surtout de l’argent à se faire !
Regardez comme on encourage les conducteurs à devenir des taxis pour quelques euros. On leur explique que leur voiture leur coûtera moins cher tous les mois. D’abord on les a convaincus qu’il fallait la louer plutôt que l’acheter. Ensuite, le fait de covoiturer sur une plateforme rembourse un petit peu la location, coûte moins cher en carburant, etc. En réalité, c’est le côté opportuniste qu’on vise chez les conducteurs. Le sentiment d’avoir trouvé un bon plan au présent sans penser qu’à l’avenir, ils auront payé leur voiture plus cher et que l’augmentation du prix carburant les aura saigné de toute façon.
Pourquoi croyez vous que l’état accorde une prime de 100 euros pour covoiturer grâce aux plateformes ? Ne sommes-nous pas dans une ère économique où à la très secrète tablée des nouveaux rois, il n’y a plus que des patrons de start-up ? Les syndicats n’y sont pas conviés et de manière logique puisque ces nouveaux esclavagistes n’ont pas d’employés. Leur système est bien huilé puisqu’ils n’ont aucune officine et n’ont recours qu’à des travailleurs indépendants. La « start-up nation à la française », ça ne vous rappelle rien ?
Vous avez raison ! Vos voitures vous appartiennent et vous y transportez qui vous voulez, quand vous voulez. Ce n’est pas pour les quelques grammes de carburant que vous allez consommer en plus que ça va changer vos vies. Ensuite ça vous rapprochera de vos semblables au niveau social, en dehors de l’argent et d’internet. Enfin, moins rouler vous permettra de vraiment faire quelque chose pour la planète.
Redevenir un humain qui ne consomme que ce dont il a vraiment besoin pour vivre, c’est aussi optimiser son trajet avec les moyens dont on dispose. Pour amortir le prix de votre voiture, il faut rouler efficacement. On doit respecter la mécanique pour qu’elle dure au-delà du crédit. Ensuite préserver les routes pour éviter l’ajout de pétrole pour réparer les trous. Il faudrait enfin utiliser son véhicule pour transporter des gens ou un chargement quand on ne peut pas faire autrement. Le transport automobile est toujours un dernier recours, il ne doit pas être une mauvaise habitude. La balade en voiture, c’est le seul luxe qu’elle nous permet et croyez-moi sur parole, quand c’est la nature qu’on veut découvrir, l’argent gâche toujours la relation.
